Face à la misère sociale et à la détresse de la population congolaise, dont 80%, vit de l’informel ; suite à la décision prise par le gouvernement le 15 mai dernier pour un déconfinement partiel. Décision accueillie par l’ensemble de la population, le Frère Kévin DESSINGA, a fait un constat personnel et s’est prêté à nos micros pour exprimer son opinion.
Bonjour Monsieur l’Abbé, est-ce que vous pouvez-vous présenter pour nos lecteurs ?
*Bonjour, je suis le Frère Giscard Kévin DESSINGA, Frère Franciscain, actuel responsable des Frères Franciscain du Congo, Maître Assistant CAMES, Enseignant de Philosophie à l’Université Marien NGOUABI, de Brazzaville, notamment, à l’Ecole Normale Supérieure (ENS).
-Face au déconfinement partiel, le constat est que la population commence à retrouver sa gaîté, quelle est votre réaction ?
Frère Kévin DESSINGA/ Je suis heureux finalement, vaut mieux tard que jamais, que les autorités aient compris que pour une population, qui vit à 80% de l’informel, le confinement, n’était pas la solution idéale. Je comprendrais encore les autorités, parce qu’on a une certaine responsabilité publique, ou non et face à ce qui se passe sous d’autres cieux, et certainement, pris de panique dans la précipitation, ils ont exigé ce confinement et quand on voit les choses, telles qu’elles se déroulent, mais seulement parce qu’ailleurs, on a commencé à déconfiner mais aussi, la réalité est là ! Et tout le monde avait prophétisé l’hécatombe tout justement parce que pour les peuples, qui ont des structures sanitaires, ultramodernes et viables, il y a eu des morts par centaines des milliers, le cas des États-Unis, qui ont franchi la barre de 100.000 morts, l’Italie, qui a dépassé la barre de 35.000 morts. Voilà pour l’Afrique en s’attendait à l’hécatombe ! Dieu merci, on ne sait pas par quel miracle, certainement, Dieu nous a protégé, on ne sait comment, et que l’Afrique doit avoir quelque part des barrières psychologiques et spirituelles, on ne sait pas, comment l’hécatombe, n’est pas arrivé. Le pire est passé, et qu’on ne dise pas le contraire pour que les autorités aient décidé de nous déconfiner, c’est une bonne chose, et on le sent justement sur les visages des gens. On ne fait jamais le procès de l’histoire ! Cela, est sans commentaire, je le dis, ce qu’ils ont pris comme décision le 15 mai, si on pouvait la prendre le plutôt, se serait mieux à la place de confiner le 31 mars, je comprends les circonstances, on pouvait au moins pour la première fois demander aux congolais de sortir de moins en moins, instaurer le couvre-feu et exiger le port du masque obligatoire et les petits artisans, comme tout le monde, vaquer à leurs occupations. On a déconfiné bien sûr et les gens ont retrouvé leur sourire mais, il y en a encore, qui vont payer ces dettes, il y a des gens, qui vont payer leurs dettes de location. Le confinement, va nous rattraper d’une manière ou d’une autre. Tant vaut mieux plus tard que jamais. Je crois que c’est une bonne décision qui a été prise.
-Est-ce que le confinement avait sa raison d’être ?
Frère Kévin DESSINGA/Dès le premier jour, je disais à ceux qui pouvaient m’entendre, je disais que je ne crois pas et j’ai publié un article sur facebook, sur mon poste avec un peu d’ironie en disant « ce virus intelligent, qui serait parti de la Chine, arrive en Europe, part aux Etats-Unis, part en Asie et attend deux mois pour débarquer en Afrique. Alors que les chinois viennent en Afrique tous les jours comme chez eux ». Donc, dès le départ, si on était un peu plus attentif, le constat, c’est lequel malheureusement, dans ce pays, on écoute plus les féticheurs que les intellectuels, on écoute plus les marabouts que les chercheurs parce que nous avons cette mentalité fétichiste, qui remonte peut être du temps des ancêtres, on ne sait pas comment ? Un analyste désintéressé avait dit que le coronavirus, n’avait pas longue vie en Afrique. Chez nous, on dit dans ma langue maternelle, « on reconnait l’habilité d’un chasseur par sa démarche ». Dès le départ cela se sentait déjà l’échec, on pouvait prendre une autre position malheureusement, la décision, qui a été prise tant mieux autant pour nous, qu’on soit épargné.
-Frère Kévin, le coronavirus, la COVID-19, réalité ou fiction ?
Frère Kévin DESSINGA/ Officiellement, à la télé, la radio et les réseaux sociaux, on en parle. Mon expérience personnelle, je n’ai pas encore rencontré dans mon entourage, quelqu’un, qui souffre du coronavirus, même quelques morts ! Quand, j’ai essayé de m’approcher de certains parents, ils m’ont dit que leur frère avait déjà des problèmes de santé ainsi de suite et eux-mêmes, ils étaient surpris, qu’on dise que leurs parents sont morts du coronavirus. La vérité officielle, contre l’expérience communautaire, comment trancher cette affaire ? Si cela pour nos autorités, que ça existe ! Si on voit ce qui se passe dans notre société et ce qui se passe ailleurs, je dirais, je l’assume, le coronavirus, chez nous en particulier et e, Afrique en général, est beaucoup plus économique, politique et diplomatique plurielle. Parce que l’Afrique est beaucoup plus connue par la menesis, ce que les grecs appelaient par l’amenésis, c’est-à-dire, le désir d’imiter de façon bête l’amenésis. Ailleurs, là où on a dit confinement, nous avons dit confinement, ailleurs là où on a dit indépendance, nous avons répété dépendance, ailleurs, om on a dit démocratie, chez nous, nous avons dit démocratie, sans la possibilité de la faire, ailleurs, on a dit fiabilité institutionnelle, chez nous, nous avons dit flexibilité institutionnelle. Donc, voilà ! Je crois que le futur, nous on dira assez. Mais mon expérience personnelle, vu ce qui se passe ailleurs, nous avons quel hôpital ? Et quand, on arrive pas à soigner une femme, qui se rend à l’hôpital pour l’accouchement, elle doit donc mourir pour donner la vie ! Quand on n’arrive pas à diagnostiquer la malaria dans nos hôpitaux, on saura diagnostiquer le coronavirus ? Comment, on raconte des histoires et les médecins ont des explications à donner aux peuples congolais au nom de leur déontologie. Je crois qu’ils doivent dire au moins la vérité au peuple, qu’on dise que nous avons été épargné, il n’y a pas de honte à le dire ! Non ! Nous avons été épargné, mais c’est comme une histoire nationale et on doit entrer dans cette foi nationale, chacun à sa vérité de par son expérience mais, on doit réfléchir. Pour cela, je suis convaincu.
-Abordons, le deuxième thème de notre entretient, de façon succincte, Frère Kévin, est-ce que vous pouvez nous parler de la Pentecôte ?
Frère Kévin DESSINGA/ Voilà ! Merci beaucoup, nous avons peut-être vous dire de ce que la Pentecôte, cinquante (50) ans après la Pâques et le résurrection de Jésus, Pentecôte vient du grec ancien « Pentékotés », qui signifie cinquantième. Donc, le cinquantième jour après la Pâques. La Pentecôte chrétienne est une réplique de de la Pentecôte juive, chez les juifs, on l’appelait la Fête de Semaines, à savoir, sept semaines après la Pâques. La Pâques juive, c’était la Pésa, c’est-à-dire, la traversée de la mer rouge, sept semaines après, c’est le jour où Moïse est descendu du Sinaï, avec les dix commandements, avec la loi. Ce mythe-là, de ce peuple nomade, qui était éparpillé à travers l’Egypte, sous la conduite de Moïse, ils ont traversé la mer rouge et au-delà de la mer rouge, ils ont reçu, cinquante (50) jours après et sept (7) semaines après le don des dix (10) commandements de Dieu et dès lors, le peuple juif est devenu le peuple de Dieu avec la loi fondamentale, celle, qu’on peut appeler actuellement une constitution, les dix (10) commandements. Et, le jour de la Pentecôte, justement aussi, le nouveau peuple de Dieu à savoir : les Apôtres de Jésus, reçoivent le don de l’esprit pour commencer une nouvelle histoire d’amour avec Dieu scellée en Jésus. Donc, la Pentecôte chrétienne, n’est qu’une réplique de la Pentecôte juive. Pour dire qu’un nouveau peuple de Dieu est né et qu’il a la mission d’annoncer les merveilles de Dieu. Mais, ce qui est intéressant aussi, à travers la Pentecôte, c’est que l’esprit qui est descendu sur les Apôtres, ne s’est pas présenté les mains vides, il est arrivé avec ses sept (7) dons : sagesse, intelligence, connaissance, piété, crainte de Dieu, force…ainsi de suite. Donc, désormais les Apôtres imbus de cette force de l’esprit auront la force et le courage d’annoncer la Bonne Nouvelle au monde, c’est ici qu’on a vu quelqu’un comme Pierre, qui avait renié connaître Jésus le jour de vendredi saint, quand, on lui pose la question à savoir que vous ressemblez à un galiléen, non ! Non ! Tu ne t’es pas trompé de personne. Finalement, le même Pierre, poltron, peureux, traitre, prend le courage de faire un discours solennel et à partir de là, commencera justement les Actes des Apôtres, toute l’histoire de l’église que nous connaissons depuis le commencement jusqu’à aujourd’hui, il y a 2020 ans. Donc, la Pentecôte, bien sûr l’esprit est venu sur nous, mais pour nous les chrétiens, elle devient le début d’une nouvelle mission. C’est nous les Apôtres d’aujourd’hui, appelés à annoncer la Bonne Nouvelle. Vous le savez, je le dis toujours le problème que nous avons au Congo et en Afrique, ce n’est pas que nous ne sommes pas chrétiens, mais nous ne le sommes pas jusqu’au bout, c’est cela le problème en Afrique, c’est-à-dire, l’Afrique a du mal d’aller jusqu’au bout, jusqu’au bout de ses traditions, jusqu’au bout de ses convictions. Nous avons embrassé la démocratie, mais sommes-nous allés jusqu’au bout ? Non ! Nous ne sommes pas allés jusqu’au bout. « Démocratie », mais quand ça me plait, je peux changer la constitution, « démocratie »,mais quand ça me plait, je peux nommer les députés, « démocratie », mais quand ça me plait, je peux nommer les sénateurs. C’est ce qui se passe un peu partout en Afrique. Au contraire, si nous étions dans certains pays africains, là où on a essayé d’aller jusqu’au bout de la démocratie, jusqu’au bout de la logique du développement, les choses semblent marcher. Quand nous prenons l’exemple, le Sénégal aujourd’hui, c’est un petit pays, qui n’a pas de pétrole, une grande partie du territoire est désertique, le Sénégal avance à pas de géant ! Les petits pays, qui ne pouvaient pas tenir devant le grand Congo et même les deux (2) Congo, parce qu’ils ont essayé d’aller jusqu’au bout et il y a encore beaucoup de choses à faire, comme réellement, ils sont passé à l’Eco et que c’est la Banque de France, qui contrôle le taux de change et le taux est fixé et arrimé à l’Euro, quand même, déjà le fait qu’ils sont séparés de l’Afrique Centrale et nous verrons comment, ils vont nous dépasser de loin, il vous suffit de regarder par les réseaux sociaux. Ici, chez nous, nous avons du mal à avoir l’internet ! Mais en Afrique de l’Ouest, ça coule, ça coule. Cela est bon ! Que les congolais apprennent d’aller jusqu’au bout de leurs convictions. Ce n’est pas le fait d’être médecin ! Mais être médecin achevé. Le problème n’est pas d’être un Enseignant ! Mais être Enseignant amoureux et passionné de l’enseignement, le problème, n’est pas d’être Journaliste, mais être un Journaliste jusqu’au bout ! C’est ce qui nous manque. Nous, c’est la débrouillardise, nous, c’est l’amateurisme, c’est ça le grand problème. On est opposant, en même temps, on est au gouvernement, mais une opposition républicaine et il faut venir en Afrique pour écouter et voir cela ! Vous comprenez, non ! Parce que la foi, n’est pas détachée de la vie, la foi est chrétienne, d’ailleurs, c’est pour cela que Jésus était jugé par Pilate ! Et d’ailleurs, c’est le peuple, qui l’a condamné ! Parce que, quand on a posé la question au peuple, « qui voulez-vous que je libère, Jésus ou Barabas ? ». Le peuple a dit Barabas. Donc, publiquement la démocratie est un échec ! Parce qu’un être humain avait été condamné sur la base des principes démocratiques. Donc, ça, c’est le grand problème ! Et je crois qu’on doit apprendre d’aller jusqu’au bout, faire des choses jusqu’au bout. Autrement ; on ne sait pas ! On a vu la vie, s’il fait sauver la vie d’accord ! CMII, 3ème, Terminale, ils vont reprendre les cours oui ! L’Université non ! Mais, qui est plus mûr, un enfant du CMII, peut se protéger mieux qu’un universitaire ? Mais, c’est la démocratie, c’est aussi ça ! La démocratie, c’est la dictature de la majorité par définition. La démocratie, par définition, c’est la dictature de la majorité, c’est-à-dire, qu’une majorité des borgnes, au nom de la démocratie peut décider, qu’on crève un œil à tous ceux qui ont deux yeux au nom de l’égalité pour que tout le monde soit borgne, c’est la démocratie. C’est le pouvoir de la dictature de la majorité. C’est aussi, une chose à faire et à un certain moment, on s’estime à dire qu’en démocratie, c’est la majorité, qui décide. Espérant, qu’ils vont toujours décider pour le bien du peuple, c’est notre souhait.
Signalons que le Frère Giscard Kévin DESSINGA, est Ecrivain, romancier, dramaturge, essayiste, philosophe-épistémologue, Africain de naissance et Africaniste par choix de vie, Giscard Kevin Dessinga est membre de l’Ordre des Frères Mineurs (Franciscains) et originaire du Congo-Brazzaville. Membre de la nouvelle génération des intellectuels africains qui cherche à poser le problème de l’Afrique en termes de responsabilité partagée, il publie avec"Entre la persévérance et l'abondan", son premier ouvrage aux éditions et maintenant, il a déjà publié plus de cinquante ouvrages telque: Regards croisés sur la citoyenneté; Manifeste de l'Emergence Africaine ; La responsabilité du temps perdu- L’Afrique face aux enjeux et défis de la crise migratoire; J'enseigne, mais comprennent-ils? Repenser la manière d’enseigner en Afrique....et bien d'autres.