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Littérature : MWANA  OKWEMET, le fétiche et le destin 

par André LOUNDA 10 Novembre 2022, 17:16 Culture et Arts

C’est le titre du premier roman de l’écrivain François ONDAI AKIERA, préfacé par Boniface MONGO MBOSSA paru  en 2022 aux Éditions Les Lettres Mouchetées à Pointe-Noire. Un roman historique de 260 pages subdivisé en 6 chapitres qui met en scène Obambé Mboundjè dans les pays Mbochis et Ngangoulous de l’Alima, a été au centre d’une rencontre littéraire le mercredi 09 novembre 2022 à l’Institut Français du Congo (IFC) pour une deuxième lecture sous la critique littéraire du Dr Winell France Palmers et de l’écrivain Ramsès MBONGOLO.

Ce roman composé des textes d’histoire de la résistance congolaise pendant la période coloniale dans les années 1911 dans la partie septentrionale du Congo, en République du Congo la plupart des textes historiques ne parlent que des résistances Kongo dans le sud du pays. « MWANA OKWEMET le fétiche et le destin »,  éclaire l’opinion public congolais et international sur les résistances des peuples Mbochis et Bangagoulous

, dans le bassin de l’Alima pour leur refus de l’asservissement imposé par les colons et sur les conséquences qui en découlent au carrefour du XIXe et du XXe siècle. A la page 34 l’écrivain a retracé comment était oppressé les populations et leurs organisation contre l’oppresseur : « Mboundjè trouva en nga’Atsèssè un allié efficace dans l’éveil des consciences en faveur de la cause du refus. Celui-ci ne manquait aucune occasion pour tonner contre l’intrusion étrangère. Il fit de la cérémonie d’intronisation du notable Nga’Idzemi à E’Ndolo une tribune à la cause du refus. Ses harangues devinrent proverbiales et furent répétées longtemps après sa capitulation en 1913 ». Le saccage d’Okkoo et d’Eytala’a ainsi que le meurtre perpétré par les colons sur deux citoyens innocents et paisibles à Okkoo engendra questionnements et indignations. De violentes détonations mirent un terme au conseil qui se tenait dans la salle « mbalé », à Bèlet, en vue de la résolution des problèmes. Lors de cette opération dirigée par André Laclos« un feu nourri s’abattit sur Oba’mbé Mboundjè et ses compagnons » dont le poète Mbela Apendé, griot à la cour. Des crimes gratuits commis au nom de « la conquête civilisatrice ». Cette période s’est accompagnée de mesures de force draconiennes qui ont vidé Bèlet de ses habitants. Ainsi« La mission civilisatrice » revendiquée par le lieutenant François Guyonnet était en marche. Avec le capitaine André Laclos, ils n’étaient plus que les vulgaires chefs d’une bande de tueurs et de pilleurs qui terrorisaient la population (p. 51).  La construction de la liaison ferroviaire Brazzaville-Pointe-Noire, épine dorsale du Congo, fut un des moments meurtriers de l'entreprise coloniale dirigée en 1925 par le gouverneur Raphaël Antonetti. La perception de l’impôt fut une autre paire de manche. Et pourtant, d’autres maux minant la société furent le fruit des Africains natifs ou venant d’autres pays du continent noir. En guise d’illustration, Etou exigeant le remboursement de la dot versée pour Apila, la femme de grande beauté, la fit passer « du statut d’épouse à celui d’otage ». En outre, viols et enlèvements organisés par les miliciens nommés Chechias rouges vinrent envenimer les choses.

L’écrivain François ONDAI AKIERA, avec art et sagesse, incruste l’univers magico-surnaturel dans cette œuvre romanesque. Cette « légende du martyre de la terre mbochie » est aussi l’histoire du personnage du roman, MWANA OKWEMET. À l’issue de tant de déboires pour stérilité, une véritable plaie africaine, Lembo’o la-Mbongo, l’une des femmes d’Oba’mbé Mboundjè, accoucha d’une fille au destin singulier. La nommée MWANA OKWEMET, traduisible par « La fille du fétiche ». Le « fétiche de la justice infaillible ». Ayant échappé de justesse au massacre de Bèlet, MWANA OKWEMET échappa aussi à une odieuse conspiration sur sa terre de refuge. En effet, des personnes de mauvaise foi projetaient de la kidnapper en échange au montant de la dot versée pour la main d’Apila. En 1925, MWANA OKWEMET, initiée au rite ekiéra, fut baptisée Ngalefourou « la protégée de la cendre sacrée » (p. 101). Symbole de la force et de la résistance, MWANA OKWEMET sera rattrapée par un destin de femme imposé par la barbarie: l’obligeant à faire couche commune pendant des années avec l’un des assassins de son père, le milicien centrafricain Gbakoyo. De cette union naîtra Lucie. Quelques années plus tard, une bataille pour la garde de l’enfant fut une expérience stressante pour Mwana Okwèmet mais elle vaincra. Finalement, mariée légalement à Dieudonné Elenga, elle connaîtra le bonheur. De cette union naîtra un fils, Robert. Mwana Okwèmet mourra centenaire en 2004, selon la parole prononcée par le vieil A’Mbolo’oo Mwana Pèly, lequel avait prédit auparavant avec succès l’attaque d’un boa contre Ondongo Nyonsi.

Ce roman constitué de beaux textes, dont la beauté du langage utilisé par François ONDAI AKIERA est pérenne et saisissante est un récit historique qui fait face à la réalité élucidant une période méconnue ou oubliée de conquêtes et résistances est d’une valeur inestimable pour l’historien et le sociologue. Il retrace un siècle d’histoire coloniale, ses affres bavures et interroge une période complexe de l’histoire mbochis et bangangoulous qui échappait à nombre de compatriotes. D’après Sauve Gérard, le modérateur de cette rencontre a déclaré qu’en 2022 est le plus beau roman constitué des plus beaux textes que nous avons lu jusque-là.

A noter que ce roman coûte onze mille (11.000) FCFA et il est téléchargeable en ligne.

 

 

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